La sculpture et la théorie de l’évolution

Il n’y a pas de vraie  sculpture sans vie ! telle est la raison de cet article « La sculpture et la théorie de l’évolution« .

« La vie d’une sculpture » ; qu’est- ce que cela veut dire ?
Je perçois que celui qui donne à l’origine de la vie un sens improbable ou hasardeux, prêche aussi « la fin de l’art ».

La sculpture et la théorie

La « théorie de l’évolution » veut signifier que le vivant est en perpétuelle transformation et qu’il subit des modifications morphologiques comme génétiques dans l’histoire.
Mais pas seulement :

Dans la « théorie de l’évolution » il y a l’idée de l’origine.
Certains y voient

  • un moment singulier qui ne s’explique pas et qui se réfère à Dieu
  • d’autres considèrent que c’est un évènement de type « chance » parmi une infinité de possibles !

La « théorie de l’évolution » intéresse la sculpture par la naissance de celle- ci :

  • d’où vient la statue finie là devant moi ?
  • Quel a été le processus de son apparition ?
  • y a t-il un rapport avec la création ?

Création et sculpture

Création suppose qu’une action s’est produite à partir de rien.
Se peut – il qu’il y ait un « rien » dans l’acte de sculpture qui permette de parler de création ?
et que l’on ne parle pas de vie si on parle de création ?

Mais alors qu’elle est cette « vie » ?

  • Quel est le processus de création d’une œuvre sculptée ?
  • Quel est l’origine de l’œuvre ? comment la définir ? :

La sculpture et le "rien"

La statue naît d’un concept qui est mien, une sorte de concept « premier ».

Je crée de "rien"

Je crée à partir de « rien » :
Effectivement il y a un « rien » lorsque je commence une statue ;
lorsque je trace les premiers traits de crayon sur le papier pour y fixer l’idée associée à ma recherche.
Une forme de « rien », car la figure, le sujet « femme et enfant » par exemple, est une image préexistante, qui m’est facilement accessible :

  • dans la réalité (une mère portant son enfant)
  • sur une image
  • de mémoire.
    Je crée donc grâce à cette image « modèle », image « pré existante ».

    Le rien, défendable, ne se situe donc pas à cet endroit.

L'évolution part de zéro

Que servirait de faire (une sculpture) une « œuvre » ? si celle- ci existait déjà ? me disait un sculpteur.
En effet l’esprit de création se place dans une nouveauté, une « invention »…Dire des choses qui n’ont pas été dites auparavant !

Il y a donc une « sorte de rien » avant toute sculpture.

Ce qui - est - déjà

  • la pierre
  • la terre
  • l’argile…
  • le sujet, dans une photo, la nature, etc…
  • les sentiments que je veux exprimer d’une certaine façon existent déjà aussi, du moins si je ne peux vraiment dire où ils se trouvent, je ne les invente pas. Et pourtant semble -t- il ces sentiments font partie de ce qu’il y a à dire.  

Je ne crée donc pas la matière ! je ne crée pas le sujet.
Et pourtant la création semble se placer dans le sujet : une nouvelle forme de dire celui- ci, une nouvelle façon de le déclamer, de le proclamer.

Le rien qui semble exister lors de l’élaboration de la statue est – il un vrai moteur de la création ?

Sculpture et hasard

J’ai été interloqué par la réaction d’une visiteuse devant mes sculptures exposées (exposition de 2006) ; « Qualité des statues et hasard » : « réussir un visage = un hasard ! ». 

Hasard ? vous avez dit hasard ?

Se peut – il qu’il y ait « hasard »?, un imprévisible ?
Après tant de travail à rechercher les traits d’un visage dans une argile modelée ou dans une pierre ; après tant d’acharnement pour trouver celui- ci …!

Hasard n’empêcherait pas que je sois dans la situation de trouver, en plein travail, l’outil à la main, ce que je cherche, disons les harmonies d’un visage par exemple, viendrait comme cela , tout à coup ? comme une lumière qui viendrait sans aucune raison ? 

Jamais je n’aurais pensé à un « hasard » si cette visiteuse ne m’avait dit ce mot ! car pour moi cela est inconcevable !

L’expérience de la sculpture sur pierre, ne peut me permettre de parler de hasard :
– La pierre a un prix d’achat ; par sa seule matérialité, par l’effort qui a été exigé pour la hisser jusqu’à un plan de travail, ces points ne peuvent me faire admettre qu’il y aurait des éléments qui ne seraient pas contrôlés par moi- même, sculpteur.
Non, Il faut parler de technique !

La sculpture tient compte de techniques. Cela suffit – il ?
Si la technique suffisait il y aurait une multitude d’artistes, ou aucun.
Or ce n’est pas cela qui se passe ; il n’y a ni une multitude de sculpteurs, et pas non plus aucun !

« La sculpture est technique », mais en aucun cas elle ne peut se résumer à cela ! Dire cela serait refuser le mystère !
Car il y a mystère, dans la sculpture, dans la peinture, dans l’art. Mystère qui autrefois aurait pris le nom de « magie »… Laissons donc sa place au mystère !

Martin Damay

Martin Damay est sculpteur professionnel. La pierre est la matière dominante de ses statues. Tailleur de cette pierre il s'est formé auprès de nombreux maîtres à partir de 1986. Le figuratif est devenu sa spécialité pour la sculpture de toute taille.