La sculpture et l’art sacré

La qualité devrait être la condition de l’union de la sculpture avec le sacré, un professionnalisme !
Mais la plupart des œuvres dites d' »art sacré » manifestent la plupart du temps l’impossibilité de cette union.

L'art sacré et l'image

« L’absence totale d’images n’est pas compatible avec la foi dans l’incarnation »
(Cardinal Ratzinger)

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Nort sur Erdre, sculpture sur le devant de l'autel.

C’est le rôle de l’’art sacré de tenter l’association du beau et du fonctionnel.

L’ »art sacré » est une orientation de l’art (l’art au sens commun), comme une option de cet art. Car sa noblesse ne se réduit pas à une orientation vers le « sacré”.
Les conditions pour parvenir à l’une ou l’autre distinction (profane ou sacré) restent toutefois assez exigeantes. 

Le sacré est une orientation de l'art

Le fonctionnel oriente la sculpture puisqu’il l’associe à la “mission” dans laquelle elle est placée : une église, un temple…
L’autel par exemple, est à la fois
– beau
– et utilitaire.
Il peut être un lieu d’essai d’association d’art et sacré.

Les exigences de l'art

Le défaut de technique dans un art en donne souvent des œuvres d’amateurs :
Le sujet lui- même, tiré de textes « sacrés », ne rend pas à la sculpture ce qu’elle perd lors du manque de technique.

Le véritable sculpteur est celui qui fait l'extérieur et l'intérieur.

La forme sculptée, par exemple une main (la main d’un personnage sculpté) ne peut être vue uniquement sous l’idée de symbole. La main sculptée n’est pas le symbole de la main !

Le vrai sculpteur va plus loin que le symbole, il cherche une expression rendue par le potentiel de la pierre qu’il travaille. La véritable sculpture contient un « intérieur » ; la forme, bien au delà du symbole, est habitée.
La vie ne peut être extraite de la notion d’art.

L'art ne peut se passer de la magie de l'art

Dès lors, l’appropriation d’un art ou d’un médium (peinture, sculpture…) au profit d’un message qui est autre que son essence, viserait à un art «religieux» oui, mais sans la magie de l’Art ?

Cette « magie » de l’art, exorcisée, provoque l’absence de modelé trop sensuel !

  • Des œuvres plates et pales par la coupure historique due au manque souvent radical de technique est regrettable.

… et la magie de l’art exorcisée, entraine avec elle la vie qui y était contenue.

  • Ce n’est pas le sujet qui rend artistique.
  • Ce n’est pas le sujet qui rend «sculpture».
  • Ce n’est pas le sujet qui possèderait initialement la beauté idéale ou plastique, travail qu’il revient à l’artiste de faire ressurgir.

Une appropriation vers le "religieux" quand le religieux ne peut "advenir"

La magie de l’art, étrange, inconnue ou trop mystérieuse doit être remplacée par le sujet qui l’exorcise. Mais à trop exorciser l’art, que devient- il ?

L'amalgame éloigne l'œuvre de l'art

Si l’œuvre, en particulier la sculpture provient d’une technique, elle peut difficilement se confondre avec « le religieux ». Il s’agirait de « faire de l’art » pour que cela soit religieux, quel- que soit le thème

  • Emporté par une grâce extraordinaire ?
  • inspiré divinement ?

Si je dissocie l’art du travail nécessaire à exécuter une œuvre, je néglige la technique, et cela se constate ; le monstre n’est pas inventé par les temps modernes : Des œuvres le manifestent : une contradiction se trouve dans leur finalité, une contradiction inévitable :

  • Amalgamé, les figures sont « monstrueuses », les proportions bafouées, proches souvent de la déshumanisation, et là se trouve la laideur.

La distance voulue avec une technique, met en exergue l’œuvre apolitique, ou anti- politique, comme si était placée la croyance d’une supériorité de la grâce sur le temporel.

Dans le résultat, hétéroclite et souvent d’amateur, règne une nostalgie plus qu’une inspiration, le raisonnable plus que le génie vivant.

Que retenir ?

L’art qui est appelé « sacré » exprime la plupart du temps l’impossibilité de l’ accord entre « art » et « sacré ».
De fait y a t-il une possibilité d’association ? : Car la magie de l’art, étrange, inconnue ou trop mystérieuse, doit être transcendée par le sujet qui l’exorcise ! Mais à trop exorciser, l’art véritable s’éteint et que devient- il ?

Martin Damay

Martin Damay est sculpteur professionnel. La pierre est la matière dominante de ses statues. Tailleur de cette pierre il s'est formé auprès de nombreux maîtres à partir de 1986. Le figuratif est devenu sa spécialité pour la sculpture de toute taille.